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Interview : M. Cayen

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Après M. Schlenker, voici l’interview de notre nouveau responsable sécurité (accessoirement chargé des relations avec les supporters), M. Serge Cayen.


Goujon Frétillant : Quel a été votre parcours avant vos fonctions au Racing ?

Serge Cayen : J’ai été officier de police pendant une trentaine d'années, et je me suis particulièrement occupé des quartiers difficiles et des jeunes, notamment en matière de prévention. J’ai entre autre été le créateur de la compagnie d’îlotiers à Strasbourg, ainsi que des premiers îlotiers cyclistes, toujours à Strasbourg.


GF : Comment définissez-vous votre rôle au Racing ?

SC : J’y suis chargé d’élaborer le service de sécurité, que nous voulons préventif, puisque désormais avec les lois Pasqua, le service d’ordre incombe aux organisateurs et non plus aux policiers, qui ne peuvent intervenir qu’en dernier recours. Je suis également responsable du site (stade, locaux) en matière de sécurité (NDC : une fermeture du stade pendant la semaine est d’ailleurs envisagée) et bien sûr les relations avec les supporters, mais aussi avec la police et les autres clubs de D1.

GF : Quels sont les grands traits du public strasbourgeois ?

SC : C’est un très bon public, on l’a vu contre Marseille. On a déjà un très bon public et il faudrait une grande équipe et par la même un grand service de sécurité, tout va de paire. C’est un public qui aime le foot, qui vibre pour le foot. J’ai également trouvé de très bons supporters, des gens qui aiment leur club et qui veulent en donner une image, même en déplacement. Il existe bien sûr des gens turbulents, c’est normal, mais je n’ai eu que de bons échos des premiers déplacements, et ça c’est bon pour l’image d’un club.

GF : Quels sont les principaux problèmes que vous avez rencontrés à votre arrivée ?

SC : Il a avant tout fallu prendre la relève de la police. Il a fallut monter ce système de stewarding, recruter des gens qui avaient un petit amour du foot, du travail au stade pour une somme relativement modique. On a sélectionné des gens qui devaient avoir l’esprit de prévention, sans casier judiciaire et éviter le côté vigile en conciliant l’intelligence et le muscle.

GF : Pouvez-vous me citer les différents groupes strasbourgeois et les définir en quelques mots ?

SC : Il y a des supporters enthousiastes, je pense notamment aux UB90, des jeunes qui ont envi de vibrer d’animer. Il y a aussi les groupes style « équipe de copains » qui viennent au stade pour s’amuser, ce sont des gens plus âgés. Pour finir, il y a d’autres supporters, qui sont notamment dans le Kop, qui ont un peu perdu le tonus et qui viennent retrouver un certain allant, une certaine joie de vivre, dans cette ambiance énergique, énergétique même. On sent qu’il y a quand même des différences entre les groupes, ça part de la présence amicale à la présence enthousiaste, il y a graduation.

GF : Que pensez-vous de la Loi Alliot-Marie ? Ne pensez-vous pas qu’elle a été élaborée à la va-vite après PSG/Caen et qu’elle a un tapé à côté de la plaque en pénalisant les supporters ?

SC : C’est vrai qu’il a fallu un moment prendre des mesures draconiennes par rapport à ce qui s’était passé. Si l’Etat ne prend pas de mesure, il est vite taxé de laxisme. Est ce que maintenant avec les nouvelles dispositions comme les services de sécurité, il ne faut pas revoir certains détails de la loi, pourquoi pas ? Mais il appartient après un temps d’observation de déterminer quels sont les incidents et qu’est ce qui pourrait être allégé et ce qui doit être maintenu. A la Meinau on a essayé de trouver un compromis intelligent entre le vrai matériel dangereux et le matériel supposé dangereux, et ce en rapport avec la qualité des supporters. Nous on les connaît, on a un suivi, et on peut leur dire vous pouvez rentrer ceci ou cela. Dans d’autres clubs, ils ne les maîtrisent pas totalement et appliquent la loi strictement.

GF : Personnellement, trouvez-vous réellement les fumigènes dangereux ?

SC : Oui et non. Je serais assez d’accord pour une utilisation des fumigènes organisée. Cela dans une zone neutre, et que les clubs de supporters désignent des personnes chargées de synchroniser une animation, de manière à éviter que certaines personnes soient brûlées. A partir du moment où c’est organisé, recensé, bien positionné. Alors oui. Mais, dans le public, à l’heure actuelle, je trouve que c’est quand même dangereux.

GF : Et pensez-vous que les places assises soient indispensables, et qu’en sera t’il à la Meinau sachant que partout les supporters restent debout, là où on a mis des sièges ?

SC : Le problème, est que si on met des sièges et que les supporters sont debout dessus, on a rien gagné. Les sièges sont dégradés et cela coûte cher. Alors je pose la question : est-ce qu’on ne doit pas réserver des espaces relativement réduits pour accueillir des supporters debout ? Si la loi le permet, pourquoi pas, un débat peut s’ouvrir avec les associations de supporters pour monter quelque chose de cohérent. Je pense que ce serait aussi le moment de voir ce que l’on pourrait faire derrière un but (NDC : voir l’autre article consacré à ce sujet dans le fanzine).

GF : Que pensez-vous du retrait des forces de police des stades ?

SC : La police reste la police. Elle dispose de moyens légaux que nous n’avons pas. Nous on est là pour contenir les gens, pour faire de la prévention, en attendant l’arrivée des policiers si nécessaire. Ils sont une force légale avec des moyens de coercition alors que nous sommes une société privée.

GF : Ne pensez-vous pas que le stewarding a montré ses limites (Metz/Belgrade ou RCS/OM) ?

SC : Absolument, on l’a bien vu à Metz (NDC : à la Meinau également !). si la police n'était pas intervenue à coup de matraques, ils rentraient sur le terrain, et ceux-là, ils étaient méchants ... (NDC : bien vu l’aveugle).

GF : Quelles solutions y voyez-vous ?

SC : La mixité entre une présence effective de policiers dans le stade et les stewards comme cela se fait toujours en Angleterre d’ailleurs (on a toujours les bobbies dans les stades). Je pense qu’il faut trouver un compromis entre les deux et ne pas systématiquement. Enlever la police pour mettre du privé, c’est trop lourd. Quand vous avez 30000 personnes à gérer, il vous faut des personnes d’autorités représentant la loi.

GF : Pour conclure avez-vous une impression ou un message à transmettre ?

SC : Je suis fier des relations que j’ai pu avoir avec les supporters, de la bonne volonté, de ce climat constructif qui existe, puisqu’avant il y avait quelques petits problèmes. Je suis toujours content de prendre du temps, de les recevoir, parce que je pense que c’est l’âme d’un club, qu’on leur doit beaucoup, qu’on peut compter sur eux. On l’a bien vu l’an dernier, ils l’ont prouvé, nous devons nous aussi leur consacrer du temps. Claude Leroy est lui aussi partisan du dialogue avec les supporters et il en tire des éléments positifs, surtout au niveau du comportement pendant les matchs.
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